Savoir dire non

En ces temps de reprise, les sollicitations sont nombreuses et si vous voulez vous consacrer à vos projets professionnels, vous serez amené(e) à dire non à votre entourage. Comment le faire sans se sentir coupable ? Je vous invite à lire cet article qui a le mérite de bien poser le problème et vous rendra plus efficace en ne vous dispersant pas…

Apprenez à dire « non »

Oubliez la crainte de déplaire et sachez être clairs avec vos interlocuteurs. Shutterstock
Sylvie Gendreau, Polytechnique Montréal

Cette chronique se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site Les cahiers de l’imaginaire.


« Je suis aussi fier des choses que nous n’avons pas faites », déclarait Steve Jobs. On le sait en effet, dire « oui » à tout ne mène nulle part… alors, pourquoi ne pas refuser ce qui est compliqué pour nous ou nous rebute ? Craint-on le rejet ? Appréhende-t-on la réaction de celui ou celle à qui cette réponse est destinée ?

De fait, la peur de déplaire est ancrée en nous depuis l’enfance et ses racines sont tentaculaires. Nous souffrons d’un manque d’attention et par conséquent, nous voulons plaire à tout prix. Votre mère était constamment déprimée, vous vous sentiez responsable de son état, et vous avez maintenant tendance à acquiescer à n’importe quelle requête ?

Mais, à la longue, un engorgement se produit. Les requêtes d’autrui prennent toute la place, et empêchent d’aménager un temps pour soi. C’est alors qu’un mot de trois lettres devient une phrase. Non. En l’employant judicieusement, et parfois à plusieurs reprises dans une journée, il s’accompagne d’un sentiment de colère. Vous réalisez alors le temps que vous avez perdu dans des tâches futiles.

Sens des priorités

Comme le souligne Chloe Brotheridge, il faut bien voir que constamment dire « oui » est une forme de manipulation, dont l’objectif est de se faire aimer à tout prix. Ce qui évidemment ne marche pas pour deux raisons :

  • L’effet désiré se produit rarement.

  • Exécuter une tâche que l’on ne veut pas accomplir nous rend détestable la personne qui nous le demande et nous frustre parce que cela nous prive d’un temps qui aurait été mieux occupé à faire autre chose.

Toutefois, dès qu’on prend l’habitude de dire non, une difficulté nouvelle fait son apparition. Nous nous trouvons alors dans l’obligation de faire face à ce que l’on veut vraiment. Ce que l’on me demande me correspond-il ? Lorsqu’il s’agit de requêtes sans importance, le questionnement reste superficiel mais des interrogations plus profondes surgissent lorsqu’il s’agit de décisions importantes, de véritables choix de vie.

Lorsqu’on nous demande quelque chose, il est possible que nous soyons pris au dépourvu. Que faire alors ? Pourquoi ne pas proposer à la personne de formuler sa demande par écrit, sous la forme d’un courriel par exemple ? Voilà qui peut vous laisser le temps d’y réfléchir et de lui répondre.

Langage clair

En tant qu’ancien dirigeant d’une grande maison d’édition, Michael Hyatt, l’auteur de Free to Focus, reçoit souvent des demandes pour lire des manuscrits ou rencontrer des personnes qui ont besoin de conseils. Bien entendu, il n’a pas le temps d’accéder à toutes ces demandes. Il a préparé un modèle de lettre où il refuse en encourageant les auteurs à poursuivre leur travail d’écriture. Il ne lui reste qu’à en personnaliser le premier paragraphe.

« L’important, explique-t-il, est de ne pas créer d’attente en laissant la personne dans l’incertitude. Il vaut mieux un “non” positif bien formulé, cela permet à la personne de s’organiser autrement. »

Pour savoir quand dire « non » ou « oui », il faut toutefois bien connaître ce qui nous importe, ce que nous ne voulons pas et ce que nous désirons accomplir.

C’est la première étape que conseille Michael Hyatt. Soyons clairs avec notre vision de la productivité. Une fois que nous savons ce que nous désirons, il sera plus facile d’évaluer nos compétences et nos responsabilités à la lumière de ce que nous devons (vraiment) faire nous-mêmes et ce qui serait mieux fait par d’autres, ou par un robot.

Cet exercice nous aidera ensuite à faire une liste de choses à ne pas faire plutôt qu’une liste de choses à réaliser.

Temps libre

Le temps libéré doit nous offrir du temps pour dormir, réfléchir, créer, échanger et nous amuser davantage. Si l’on en profite pour nous charger de tâches qui nous coûtent, cela ne servira pas à grand-chose.

Dans son ouvrage, Free to Focus, Michael Hyatt rappelle l’innovation de Henry Ford qui a été le premier à réduire la semaine de travail à 40 heures ! Cela a causé un enthousiasme incroyable chez les employés qui n’avaient que le dimanche pour se reposer avec leur famille. Leur plus grande surprise a été de constater que malgré les heures travaillées en moins, la productivité a explosé.

Reposés, nous travaillons mieux, nous réfléchissons mieux.

Encore aujourd’hui, dans la majorité des pays, le modèle de la semaine de 40 heures (voire 35 heures) est encore en vigueur, sauf que… les employés du savoir, tous munis d’un téléphone intelligent restent accessibles en tout temps ou presque. Pour eux, le nombre d’heures de travail est à la hausse !

Il n’est pas rare pour ces personnes de lire leurs e-mails tous les jours, y compris le week-end, avant ou après leur journée de travail afin d’éviter l’encombrement pendant les heures au bureau. Il est de plus en plus difficile de faire de vraies pauses.

Or sans pauses, surtout dans un monde de distractions comme le nôtre, il devient difficile de se concentrer.

Croyances à dissiper

Les méthodes de productivité qui aident à accomplir davantage plus rapidement ne sont pas nécessairement ce qui améliorera notre vie. La stratégie gagnante est d’accomplir ce qui importe. Se libérer du temps prend son sens si cela permet d’accomplir ces choses essentielles et de se ressourcer.

Nous pensons parfois qu’il est impossible de faire autrement et que les choix ne sont pas entre nos mains. Or ces croyances sont nos plus grands freins. Nous ne prenons pas le temps de tout remettre à plat sous prétexte que nous manquons de temps pour le faire, mais cela est un gouffre. On s’imagine ne pas être suffisamment disciplinés, mais avec les bonnes habitudes en place cela peut se faire plus facilement qu’on ne le pense.

Pour une partie de notre temps, nous pouvons tous être en contrôle. Cela implique toutefois que nous soyons clairs avec nos désirs et les compétences à exploiter pour rediriger les tâches qui ne conviennent pas.

Je vous propose de suivre les conseils de Michael Hyatt, de faire votre liste de choses à ne pas faire, d’éliminer les tâches qui ne sont pas essentielles ou de les rediriger en les déléguant.

Cela vous permettra de vous focaliser sur les tâches essentielles et de récupérer du temps libre pour vous ressourcer afin de donner le meilleur de vous-même lorsque viendra le moment de vous remettre au travail.

Et, vous l’avez compris, la condition sine qua non est de refuser toutes les demandes qui ne sont pas compatibles avec vos objectifs ou votre vision… sinon ce sont les autres qui contrôleront votre agenda.

L’exercice que je vous propose cette semaine : apprendre à dire non avec élégance, c’est ICI.The Conversation

Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique Montréal

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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